Les Incendies de forêt


    Le feu est un processus biophysique complexe avec de multiples effets directs et indirects sur l'atmosphère, la biosphère et l'hydrosphère. Par ailleurs, il est maintenant largement reconnu que, dans certains environnements propices aux incendies, les troubles du feu sont essentiels pour maintenir l'écosystème dans un état d'équilibre.
   Les incendies de végétation sont l'une des catastrophes naturelles majeures qui endommagent d'immenses surfaces forestières et herbacées dans le monde entier. Plusieurs centaines de millions d'hectares de végétation brûlent chaque année dans le monde, avec des répercussions néfastes sur la situation économique, l'environnement, la sécurité, la santé humaine, et la faune et la flore sauvages des pays touchés. La prévention des incendies est l'une des tâches essentielles des politiques liées aux incendies, et elle exige avant tout une surveillance précise et effectuée au bon moment. Compte tenu des immenses superficies vulnérables au feu dans le monde et des observations limitées au niveau du sol, la surveillance du risque incendie par les satellites opérationnels est une tâche importante du système mondial d'observation. (Felix Kogan, FAO 1998).

   On parle d’incendie de forêt lorsqu’un feu a menacé un massif de plus de 1 hectare de forêts au sens strict (forêts de feuillus, de conifères ou mixtes), ou de formations subforestières (Au niveau de la méditerranée, sont composés par les maquis ; formations fermées et denses sur sol siliceux, garrigues; formations ouvertes sur sol calcaire, et les landes; formations sur sols acides, composées généralement de cistes et de bruyères).


   Dans le bassin méditerranéen cette définition varie selon les pays en fonction de celle de la forêt, mais aussi selon des critères annexes : lieu d’éclosion et distance par rapport à la forêt, nature du propriétaire, taille du feu... 

Bulgarie : Tout feu se développant dans les forêts, les plantations, les vergers à graines et les pâturages.

Chypre : Feu éclos à l’intérieur des forêts domaniales ou sur des terrains privés à moins d’un kilomètre des forêts domaniales.

Espagne : Feu se développant dans des surfaces boisées ou couvertes par des espèces non cultivées.

France : Feu qui a atteint des forêts, landes, garrigues ou maquis d'une superficie d'au moins un hectare d'un seul tenant (et ce quelle que soit la superficie parcourue). Le terme "atteint" sous-entend qu'une partie au moins de l'étage arbustif ou de l'étage arboré a été détruite.

Grèce : Feu de végétation, en dehors de la végétation agricole.

Italie : Tous les feux de végétation sont considérés comme des feux de “forêts”.

Liban : Feu affectant la forêt, les garrigues, les zones de parcours pour les animaux, les terres agricoles ou les vergers.

Maroc : Feu concernant les formations forestières et matorrals appartenant au domaine forestier de l’État ou soumis au régime forestier.
Portugal : Feu affectant une zone boisée, non agricole ou urbaine.
Tunisie : Feu affectant des forêts naturelles ou artificielles de plus de 4 ha. 

  Ces quelques exemples[1] illustrent bien la grande variabilité dans les définitions des feux de forêts. Dès lors, les comparaisons entre pays doivent être menées avec précaution.

Figure: Part de la surface forestière brûlée dans les pays du bassin méditerranéen entre 1981-1997, FAO, Rome 2001 [1]

   Il est très important de faire distinction entre feux contrôlés et incendie ; les  "feux contrôlés" désignent des feux allumés intentionnellement dans un but spécifique, tandis que le terme "incendies" correspond à des feux accidentels ou à des feux ayant échappés au contrôle. 


Facteurs et causes des incendies de forêt:

   Il existe 3 facteurs essentiels pour le déclenchement du feu :


-Le combustible (végétation dans le cas d'un incendie de forêt).
-Une source de chaleur (flamme, étincelle).
-Le Comburant (Oxygène /vent).

Figure: Facteurs intervenant dans le déclenchement des 
incendies de forêt.

   Pendant les périodes de forte chaleur et de sécheresse les végétaux annuels achèvent leur cycle de vie, certains d'entre eux se dessèchent entièrement (comme les herbacées), d’autres perdent toutes ou une partie de leurs feuilles, ces matériaux sont hautement combustible. De plus, certains végétaux (pyrophytes)  comme les Cistes ou le Pin ou encore l’eucalyptus peuvent favoriser les incendies, en effet ils contiennent dans leurs tissus des substances hautement inflammables, qui, pendant les périodes de forte chaleur sont dégagées par évapotranspiration.

   En contacte de l’aire (qui contient 21% de dioxygène) le mélange (comburant) devient hautement inflammable, en effet, on ne peut pas parler de feu (combustion) en absence d’oxygène (dioxygène).

   Ainsi, un facteur déclencheur (une source de chaleur) comme un mégot ou une étincelle peut rapidement entrainer une combustion.

   Causes des incendies de forêts:

  L’origine d’un incendie de forêt est souvent difficile à déterminer du fait de l’absence de preuves matérielles concrètes ; il en résulte que le pourcentage de causes inconnues peut être très important. Ce pourcentage, en nombre d’incendies, atteint 18 % en Espagne, 33 % en France, 26 % en Grèce, 31 % au Portugal et 48 % en Turquie[1].

   Cependant, il existe différents niveaux de certitudes ; en France par exemple, la connaissance de la cause est renseignée à l’aide d’un des niveaux suivants : certaine, très probable, supposée, inconnue.
  Toutefois Les incendies de forêt peuvent être d'origine naturelle, ou humaine (intentionnel et criminel, involontaire et accidentel).

Causes naturelles 

  Un incendie peut se déclenché d’une manière naturelle sans intervention de l’Homme a cause d’une éruption volcanique[2] ou foudre,cette dernière très répandue en forêt boréale (orages secs), est relativement rare en région méditerranéenne, en effet c’est l’unique cause naturelle connue dans le Bassin Méditerranéen, elles représentent 1 à 5% des départs de feu seulement[3].
 Causes humaines 
Involontaires et accidentels

   Elles représentent l’essentiel des origines des incendies de forêts d’une manière générale, pour l’ensemble des pays du Bassin Méditerranéen.
   Elles résultent de négligence par rapport aux risques d’incendie, elles sont à l’origine de 5 feux sur 10.
   Les travaux agricoles (déboisement à fin de mise en culture, feux d’écobuage) et forestiers, les jeux d’enfants et les travaux domestiques sont, avec les mégots et les barbecues, les premières causes d’éclosions. Les accidents (transformateurs électriques, voiture en feu...) se rencontrent aussi.

  Pour les pays où l’économie est basée sur l’agriculture, les travaux agricoles l’une des causes les plus importantes (Ex : jusqu’à 65 % en Syrie[1]).

Intentionnelles et criminels
 
La malveillance représente 39% des incendies, elle peut être due à la pyromanie, conflit de territoire, vengeance, etc.


   A titre d’exemple, en France, et selon les statistiques publiées par la SCEES, les causes connues de départ de feu entre 1992 et 1998 (hors zone méditerranéenne) sont organisés de la manière suivante :

Figure: Causes connues de départ de feu entre 1992 et 1998 en France
Figure: Causes des incendies de forêt au niveau du bassins méditerranéen, FAO, Rome 2001[1].

 Les différents types de feux de foret 


   Une fois déclenché, un feu de forêt peut prendre différentes formes, chacune étant conditionnée par le type des formations végétales et les conditions climatiques (Force et direction du vent, température ambiante). Ainsi on distingue 3 types de feux de forêts, qui, peuvent se produire séparément ou simultanément sur une même zone :



• les feux de sol : (appelés aussi  feux de voune, feux d’avoune, feux souterrains ou feux de profondeur). Ils se déclenchent dans des grandes accumulations d’humus, de tourbe et d’autre débris de végétation morte semblables assez secs. Alimentés par incandescence avec combustion, leur vitesse de propagation est faible.

   Bien que peu virulents, ils peuvent être très destructeurs en s’attaquant aux systèmes souterrains des végétaux. Ils peuvent également couver en profondeur et ils demandent de grandes quantité d’eau ce qui rend plus difficile leur extinction complète.

   Il arrive que, en particulier durant les longues périodes de sécheresse, de tels feux brûlent tout l’hiver en profondeur et émergent de nouveau à la surface du sol avec l’arrivée du printemps.

Figure animée: Mécanisme des feux de sol


• les feux de surface : Ils brûlent les strates basses de la végétation (partie supérieure de la litière, la strate herbacée et les ligneux bas). Leurs propagation se fait par rayonnement en général et affectent la garrigue ou les landes.

   Leur propagation peut être rapide lorsqu’ils se développent librement et que les conditions de vent ou de relief y sont favorables (feux de pente).

Figure: illustration de feux de surface

• les feux de cimes : Ils brûlent les parties supérieures des arbres (ligneux hauts) en formant une couronne de feu tout en libérant de grandes quantités d’énergie et leur vitesse de propagation est très élevée. Ils sont d’autant plus intenses et difficiles à contrôler que le vent est fort et le combustible sec.
 
Figure: illustration de feux de cimes


  Les facteurs favorisant le risque de feux de forêt

   L' l’état, la composition et la structure de la végétation, les conditions météorologiques et le relief, les activités humaines, les problèmes liés aux logistiques et le manque d’expérience ou l’absence totale d’une politique de lutte contre les incendies de forêts  sont des facteurs qui peuvent plus ou moins favoriser l’éclosion et la propagation des feux de forêt.
  • l’état de la végétation :
   L’état de la végétation (combustible) est très important dans le processus de la combustion. En effet pendant la combustion du bois, une grande partie de l'énergie produite est consacrée à chauffer et vaporiser l'eau contenue dans le bois dont la capacité thermique et la chaleur latente sont particulièrement élevées. Le bois vert contient plus de la moitié de son poids en eau.

 – 1,7 kWh/kg à 60 % d'humidité ;
– 4,0 kWh/kg à 20 % d'humidité ;
– 4,4 kWh/kg à 11 % d'humidité.
 

   Cependant le taux d’humidité (d’eau) dans le combustible est un facteur clé dans le déclenchement et la propagation des feux de forêts et peut donner des fausses réflexions sur le processus de combustion.

   Le feu se déclenche dans le combustible dont  le taux d’humidité est faible (litières, herbacées sèches, etc.), puis se propage dans tout type de combustible, de plus, le combustible dont le taux d’humidité est élevé intervient dans la propagation du feu en dégageant non seulement la vapeur d’eau chaude mais aussi  le comburant hautement inflammable.

  •   La composition de la végétation :



   Certaines formations végétales sont prédisposées au feu que d’autres ; leur vulnérabilité ou leur résistance dépend de nombreux facteurs, essentiellement de leur composition spécifique, surtout lorsqu’il s’agit de la présence des espèces dites « pyrophytes ».

    Les pyrophytes sont des espèces végétales qui tolèrent le feu, certaines sont qualifiées de pyrophytes actifs, comme l’Eucalyptus,  qui favorise les départs de feu en produisant des vapeurs inflammables ce qui empêche d’autres espèces d'envahir leur habitat. D’autres  espèces comme Erica arborea, Sequoiadendron giganteum, Sequoia sempervirens, Quercus suber L. et  Melaleuca quinquenervia sont des pyrophytes passifs  qui résistent au feu grâce à leurs écorces épaisses.

   Des espèces comme Pinus halepensis, Pinus nigra, Pinus contorta, les feux modérés, favorise l'éclatement des pignes, la dispersion des graines et le nettoyage des sous-bois.
D’autres espèces comme les Cistes ont besoin de feu pour  lever la dormance des graines, ce sont des plantes pyrophiles.
  • Structure de la végétation :

    La structure du peuplement forestier - qui évolue dans l’espace temps -  joue un rôle essentiel dans la résistance ou la propagation des feux de forêts. Ainsi c’est la continuité/discontinuité du couvert végétal, horizontale (recouvrement) et verticale (strates), qui va majoritairement influencer  la sensibilité au feu du peuplement forestier / subforestiser, en favorisant ou non la propagation de l’incendie.
 
   L’intensité du feu dépend également de la microstructure. Plus un combustible est finement divisé, meilleur est le contact avec le comburant, et donc plus la combustion est facilitée. Ainsi :
- Des aiguilles tombées au sol récemment forment un tapis aéré, facilitant le contact entre l’air et la matière végétale et donc la combustion.
- En revanche, un tapis d’aiguilles au sol depuis longtemps, tassées sous l’effet du vieillissement et des intempéries, forme une couche beaucoup plus compacte, rendant la combustion plus difficile.



  • Les conditions météorologiques et d’orographie :
   Les conditions météorologiques telles que la température, le taux d’humidité de l’air, le stresse hydrique et le vent influencent fortement la sensibilité de la végétation au feu.
-Un déficit hydrique avec sécheresse et température élevée conduisent au desséchement du matériel végétal favorable à l’éclosion. De plus les températures élevées accélèrent le processus d’évapotranspiration, qui se manifeste chez les pyrophytes par le dégagement des essences hautement inflammables.

- le taux d’humidité est un facteur qui augment le risque d’incendie, que se soit pour l’éclosion ou pour la propagation du feu. En effet la vapeur d’eau augmente considérablement la température de l’air et forme des courants de convection thermique.



-Le vent quand à lui, est un vecteur mobile qui influence la cinétique des incendies, en effet, il alimente le feu par l’oxygène, mais détermine  aussi sa vitesse et sa direction de propagation. De plus, le vent accélère les réactions de combustions lorsqu’il est chargé de masses chaudes. 
 
   Encore même après l’extinction d’un incendie, le vent peut toujours faire repartir un feu, mais peut aussi projeter des bouts de végétaux enflammés plus loin sur les cimes des arbres. C’est ce qu’on appelle des « sautes de feu ». Ce scénario est rare, mais le danger est sévère.

Figure: mécanisme du saute de feu



 Les caractéristiques d’orographie telles que la topographie (pente, cuvette…), reliefs et l’exposition influencent aussi sur la propagation des incendies ;Les zones exposées (versants au vent) et les zones en haute altitude vont être plus soumises à l’action des vents.
 Dans les zones accidentées, les feux qui naissent à la base d’une pente, vont la gravir à toute vitesse du fait que le haut de la flamme brûle plus intensément. Dans une pente, le feu va donc toujours brûler vers le haut (ce sont les feux de pente).
En outre, en montagne, les conditions d’accès sont plus difficiles;  les chemins tortueux handicapent les opérations d’extinctions et de e secours.




Références: 
 Felix Kogan, FAO 1998. Etude FAO Forêts 138 - Réunion de la FAO sur les Politiques Nationales Ayant une Incidence sur les Incendies de Forêt, Rome, 28-30 octobre 1998. (http://www.fao.org/docrep/003/x2095f/x2095f0m.htm)
[1]  FAO,Rome 2001 ; Pierre-Yves Colin et al. ,"Protection des forets contre l'incendie, Fiches techniques pour les pays du bassin méditerranéen" / ISBN 92-5-204678-X
[2], Les éruptions volcaniques peuvent également être à l’origine d’incendies de forêt. Ce phénomène est cependant exceptionnel dans le Bassin Méditerranéen.
[3] Des exceptions peuvent toutefois être observées, notamment en Espagne, où, dans certaines régions, la foudre représente 30 % des départs de feu (Aragon : 38 % et Castille la Manche : 29 %).

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dimanche 15 septembre 2013